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Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/31

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Sa voix fera chanter, à la face du ciel,
Le pardon de Caïn par les lèvres d’Abel !
Sa lyre enseignera, sans haine et sans démence,
L’espérance à l’esclave, au maître la clémence ;
Elle dira qu’un Dieu sur la Croix est monté
Pour que dans l’homme un Dieu soit toujours respecté !
Qu’il nous faut, nous venus en des temps plus prospères,
Combattre et racheter les fautes de nos pères ;
Qu’il nous faut, nous leurs fils, expier le passé,
Venger le droit humain dans l’esclave blessé,
Rendre à l’être déchu - don plus cher que la vie ! -
Avec la liberté, sa dignité ravie,
L’arracher à sa nuit, l’abreuver à son tour
Des eaux de la sagesse et des eaux de l’amour,
Et le régénérer à ces sources premières,
Le cœur par les vertus, âme par les lumières !
On peut d’un joug inique avoir subi la loi,
Mais l’étude affranchit, et le génie est roi ;
Et l’esprit, combattant avec persévérance,
Tuera la servitude en tuant l’ignorance !…
Voilà ce que mon luth, de clémence animé,
Dira pour consoler tout un peuple opprimé.
Le poète est surtout l’ami de la souffrance :
Son cœur est fait d’amour et sa voix d’espérance ;
Sur toutes les douleurs, aux bons comme aux pervers,
Toujours il doit verser le baume de ses vers ;
Et toujours, de sa lyre à l’ineffable corde,
Il doit monter des chants d’espoir et de concorde.