Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/325

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Il tomba riche encor d’années,
Dans la verdeur de sa saison.
De fleurs avant le temps fanées
Sèmerai-je un jour son gazon ?…

Eh bien, ta part est la meilleure,
Doux jeune homme au rêve ingénu !
Ce n’est pas toi sur qui je pleure,
Mais sur quelqu’un qui t’a connu.

Comme un arbre en pleine lumière,
Aux rameaux par l’aube mouillés,
Tu meurs dans ta grâce première,
Avant tes songes effeuillés.

Pour toi plus d’orage en ce monde !
Touchant au port avant le soir,
Tu n’as point au gouffre de l’onde
Vu sombrer ton dernier espoir !

Atteint dans toutes tes tendresses,
Déçu dans toutes tes ferveurs,
Tu n’as point connu ces détresses
Dont le mystère est dans nos cœurs !
 
Tu n’as point, dans la solitude,
Morne et traînant le poids des jours,
Connu l’amère lassitude
De se survivre en ses amours !