Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/348

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par toutes les ressources qui lui sont propres, les ardeurs du sentiment et les lumières de l’esprit ; elle doit agir a la fois sur le cœur et sur l’intelligence ; raffermir et non ébranler ; réveiller et non assoupir ; pousser a l’action et non à la contemplation oisive ; raviver partout sur son passage l’étincelle de l’idéal, cette seule richesse de l’homme ici-bas ; enfin, elle doit poursuivre dans le monde des faits la réalisation de ce monde supérieur ou pénètrent son regard et ses pressentiments, et que régissent les saintes lois de l’harmonie. A ce prix, elle est ce qu’elle doit être : vraie, féconde, fidèle à elle-même ; à ce prix, elle conserve le don divin de la vie, et elle échappe à la malédiction du poète polonais :

« Aux oreilles qui t’écoutent tu procures d’ineffables jouissances. Tu enlaces les cœurs et les délies comme une guirlande, caprice de tes doigts. Tu fais couler des larmes et tu les sèches par un sourire, et de nouveau tu chasses ce sourire pour un instant, pour quelques heures, souvent pour toujours. Mais toi, qu’éprouves-tu ? que crées-tu ? que penses-tu ? De toi jaillit la source de la beauté, mais tu n’es pas la beauté.

« Malheur a toi ! L’enfant qui pleure sur le sein de sa mère, la fleur des champs qui ignore ses propres parfums, ont plus de mérite que toi devant le Seigneur.

« Oui, tu souffres aussi, mais ta douleur ne crée