Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/354

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convenu, pour éviter la chaleur, que nous partirions avant le lever du soleil, et dès le lendemain, au second coup de canon du port, c’est-à-dire à cinq heures du matin, nous traversions en voiture, elle, sa belle enfant et moi, la grande et large rue de Paris. Bientôt disparaissent derrière nous les boutiques encore endormies du camp Malabar, le fort qui domine la ville, et, plus loin, les monticules déboisés qui la ferment à l’est. Nous voici sur la grand’route ; le jour se lève à peine ; sous la lueur crépusculaire, on distingue au nord les lignes bleues de la mer ; au sud, les ondulations des collines, et, dans l’azur pâle du ciel, les cimes aiguës du Paeter-Boot. Approchons ! Voici les Lataniers, cette charmante demeure cachée sous les feuilles ! Des bouquets de bananiers et de cocotiers entourent ses jardins ; ses murs, à hauteur d’appui, sont chargés de lianes, et sa porte s’ouvre d’elle-même sur la route comme pour inviter à entrer. La rivière, ou plutôt le ruisseau des Lataniers, baigne tout un côté de cette habitation, et va, à quelque distance de la, se perdre dans les galets de la plage. Ce ruisseau, que traverse le canal Bathurst, descend du Val-des-Prêtres, où Bernardin de Saint-Pierre a placé les scènes pastorales de Paul et Virginie. Du chemin l’œil peut remonter le cours de la rivière ; des marges d’herbes plus vertes en décèlent la présence ; parfois on la voit scintiller comme une ligne d’argent ; parfois elle disparaît sous des bouquets de goyaviers pour se remontrer plus haut et disparaître encore