Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/357

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l’indolence quelques familles d’Indiens et de Chinois. Cependant nous avons dépassé la dernière ; à droite et à gauche ce sont des champs de canne ou de maïs, et par une pente insensible nous arrivons sur les bords déserts de la rivière des Calebasses.

Ses rives sont couvertes de roseaux et de songes sauvages ; elle s’avance sans murmure sous un berceau de bambous dont les longues tiges inclinées laissent pendre au fil de l’eau des guirlandes de lianes aux cloches de safran et d’azur. Tout un peuple d’oiseaux anime ce site agreste : ici brille comme une fleur de pourpre le cardinal au corsage de feu ; là le bengali violet aux plumes mouchetées de blanc se berce en chantant surune fataque mouvante ; plus près de nous, l’oiseau de la Vierge, aux habitudes familières, voltige et boit sur les feuilles la rosée du matin. — La verdoyante solitude ! on se surprend à y rêver une vie abritée, des jours fermés à tous les bruits, à tous les intérêts du monde. Et puis, quels souvenirs n’éveille pas cette silencieuse rivière ! Elle me rappelle le solitaire de la montagne Longue ; elle passait à la porte de sa modeste habitation. Que de fois ne fut-elle pas témoin des désespoirs de Paul et des hautes consolations du vieillard ! Pour distraire son jeune ami, il le conduisait vers ces eaux paisibles ou l’entraînait dans les profondeurs calmantes des bois. Il aurait voulu verser dans son cœur la sérénité ambiante de la nature. Quelquefois encore, pour relever