Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/209

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nous répéter, mais pour faciliter la besogne au lecteur, dessiner à grands traits la position respective des accusés entre eux.

Avril, se trouvant en prison, et persuadé que Lacenaire lui avait frustré sa part dans l’affaire de la rue Montorgueil, l’avait dénoncé comme auteur de cet attentat, auquel lui-même, Avril, n’avait pas participé, et s’était offert à le faire prendre.

François, arrêté pour une escroquerie et voulant se dégager des mains de la police, crut faire un coup de maître en révélant à la justice l’assassinat du passage du Cheval-Rouge dont il ne s’était pas mêlé.

Tous deux pensaient, sans s’être consultés, bien entendu, que la police ne ferait pas connaître à Lacenaire le nom de son délateur. François était convaincu qu’il garderait le silence sur la tentative de la rue Montorgueil ; Avril ne pouvait supposer qu’il parlerait du meurtre de Chardon.

Lacenaire, au dépôt, ayant été mis au courant de ces perfidies, il résolut de faire tomber la tête des deux traîtres avec la sienne, et, pour assurer jusqu’au bout sa vengeance, il s’astreignit à jouer à la Cour d’assises le rôle de ministère public, à réfuter pied à pied les défenses de ses complices afin de les confondre à chaque pas. Ceux-ci, en se débattant, dans les enchevêtrements de leurs crimes, contre ce mauvais génie, furent obligés de faire avec lui assaut de ruse et d’habileté. Là se trouvait l’intérêt de cette lutte judiciaire.

Quant à la Justice, elle avait, elle, un autre but. Soupçonnant, d’après les dépositions des habitants de la rue