Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/322

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banc, et dit à demi-voix : Merci ! Puis, d’une voix altérée : « Je suis condamné par vous ; je ne demande pas grâce, je préfère la mort aux fers à perpétuité ; mais, je le jure devant Dieu, ceci est un assassinat judiciaire.

François Martin cacha sa figure dans son mouchoir.

Lacenaire et lui gardèrent le silence. — M. le président prononça alors contre Lacenaire et Avril la peine de mort, et contre Martin François celle des travaux forcés à perpétuité.

— François a sauvé sa tête, dit Lacenaire en se levant, mais ce ne sera pas pour longtemps…

Et il se livra aux gendarmes.

Arrivé au greffe de la Conciergerie il se mit à réfléchir.

— Cet imbécile ! dit-il en parlant d’Avril, cet imbécile qui prétend que j’ai livré sa tête en retour de l’argent que j’ai reçu de la police ! — J’aurais pu, moi aussi, lui demander combien il avait reçu pour livrer la mienne… Mais à quoi bon ?… Si nos deux têtes devaient se payer d’après leur mérite, et à prix égal, assurément j’aurais perdu gros, car il faut convenir que la sienne ne vaut pas la mienne, et que, véritablement, l’étoffe n’est pas la même.

Après cet accès d’orgueil, il se laissa tranquillement revêtir de la camisole de force et s’endormit.

L’appareil sinistre qui gênait ses mouvements lui fit passer une nuit agitée et pleine de rêves horribles.