Page:Lacenaire, éd. Cochinat, 1857.djvu/47

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merce des soiries. N’ayant pour tout bien que son équipement militaire, il ne pouvait séjourner à Lyon, et pensa naturellement à Paris, le refuge universel. Il vendit son sabre, prit la diligence et tomba chez sa tante de la rue Barre-du-Bec.

La tante parisienne le reçut aussi mal que celle de Lyon. C’était tout simple : la dame venait de perdre vingt-mille francs dans le désastre de son frère.

Embarrassé au dernier point, le fils du failli écrivit à sa mère, reléguée à Bruxelles, et la pauvre femme, rassemblant ses ressources suprêmes, envoya cinq cents francs à son enfant. Le déserteur prit alors la diligence du Havre, et descendit dans ce port, avec l’intention de passer en Amérique ; mais l’insuffisance de la somme l’empêcha de réaliser ce projet. Il retourna à Paris, où il acheva de dépenser son argent.

Après un voyage pareil, dans ce temps où les chemins de fer étaient relégués parmi les rêves chimériques, et le caractère du voyageur étant donné, qu’on juge s’il lui fut facile de liquider son avoir !

Sans ressource encore, il lui fallut se mettre en quête d’un emploi. Il ne fallait plus penser aux journaux, car une vie semblable à celle de Lacenaire n’est pas précisément faite pour former un publiciste, et ce n’est pas en vagabondant de régiments en tables d’hôtes et de cabarets en tripots, qu’on acquiert le don si rare du style.

« Je fus réduit, au bout de quelques jours, » dit-il dans ses Mémoires, « à être sur le point de mourir de