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Page:Lacerte - La Gardienne du Phare, 1921.djvu/21

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la gardienne du phare

Ce n’est que vers les onze heures que le courrier arriva. C’est Claire que le reçut des mains de Zénaïde. Il n’y avait que trois lettres : l’une d’elle attira l’attention de la jeune fille, l’adresse était écrite d’une façon singulière, sans séparation entre les mots. L’écriture était ferme et masculine ; mais ces mots, reliés entr’eux, cela produisait un singulier effet. Madame Dumond pâlit en apercevant cette écriture. Elle ouvrit les deux autres lettres et les passa à Claire afin qu’elle écrivit les réponses ; la dernière lettre resta là, près de Madame Dumond ; on eut dit qu’elle craignait de l’ouvrir. Mais enfin elle s’y décida. Ce n’était qu’un court billet ; mais il produisit un grand effet sur celle à qui il était adressé : elle devint d’une pâleur mortelle, puis elle soupira profondément. Claire leva les yeux mais n’osa parler : elle vit la pâleur, entendit le soupir, puis Madame Dumond fit, à deux reprises, le geste de regarder derrière elle. Enfin, elle jeta la lettre dans le foyer, où brûlait un feu ardent.

Dans le cours de l’après-midi, Madame Dumond dit à Claire :

«  J’ai donné au cocher l’ordre d’atteler. Vous irez à la ville, chez l’imprimeur, afin de lui expliquer les changements que j’ai faits aux dernières épreuves. Vous reviendrez immédiatement ensuite. Je n’aime pas être seule aujourd’hui… je suis nerveuse… et un peu malade… » ajouta-t-elle, en jetant un regard derrière elle.

— « Bien, Madame, » dit Claire, « je ne serai que le temps voulu pour exécuter vos ordres. »

Claire ne fut que quelques minutes chez l’imprimeur et elle allait remonter en voiture quand elle aperçut, dans la vitrine d’un libraire, une brochure par un de ses auteurs favoris. La jeune fille entra donc chez le libraire et acheta la brochure. Comme il n’y avait aucun autre acheteur dans le magasin, on la servit immédiatement.

Arrivée aux « Saules », Claire se rendit à la bibliothèque. Décidément, Madame Dumond avait ses nerfs, car la première parole qu’elle adressa à Claire fut un reproche :