dans une heure au plus. À six heures, on découvrirait son évasion ; il lui faudrait avoir quitté N. à cette heure-là. Elle continua à examiner le port… Là-bas, un autre bateau semblait faire des préparatifs de départ : les cheminées rejetaient de la fumée.
Claire se dirigea de ce côté ; on achevait de charger le bateau. C’était un grand paquebot et sa destination, c’était B.
Claire s’adressa à un matelot qui lui sembla avoir bonne figure. Le paquebot partait, en effet, dans une petite demi-heure. N’aurait-on pas besoin des services d’un mousse à bord ? Non, le matelot ne le croyait pas.
« Mais le Capitaine est là qui se promène sur le pont », ajouta le matelot, « tu peux toujours aller lui parler, mon garçon. Je te souhaite bonne chance ! »
Claire franchit le pont volant et arriva sur le deuxième pont du paquebot, où se promenait le capitaine. Sans doute, celui-ci crut rêver quand, se retournant, il aperçut le gentil mousse qui lui faisait un salut militaire.
« Vous n’auriez pas besoin de mes services. Capitaine ? » demanda ce mousse.
— « Non, mon garçon », répondit le capitaine, sans rudesse. « L’équipage est au complet. »
Claire eut envie de pleurer ; même, des larmes de désappointement perlèrent au bord de ses cils. Le capitaine vit ces larmes, sans doute, car il demanda :
« Pourquoi désires-tu tant t’engager à mon bord ? »
— « Ô Capitaine ! je désirerais tant retourner là-bas… mon père… »
Pauvre Claire !… Elle s’en voulait de mentir ainsi ; mais sa vie était en jeu.
— « Bien », répondit le capitaine, « j’ai un petit-fils de ton âge au pays ; s’il était dans la même position que toi, je voudrais que quelqu’un l’aidât. Je t’engage, mon garçon ; tu auras à t’occuper des passagers de seconde classe ; je t’en avertis, ce ne sera pas une sinécure.
— « Merci, Capitaine, oh ! merci !! » et, spontanément, Claire baisa la main du capitaine qui lui sauvait la vie.