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Page:Lacroix - Journal d'un habitant de Nancy, 1873.pdf/158

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mercredi 31 août, jeudi 1er septembre. — 1870.

tructions qui me faisaient un devoir de rester à mon poste.

» — J’entends ! mais de quoi le gouvernement vous accuse-t-il ? Il faut bien qu’on allégue quelque motif de votre révocation. — Oui, sans doute, on allégue des ordres que je n’ai pas exécutés, mais qui étaient tout simplement inexécutables. L’ordre d’armer la population avec cinq mille fusils, qu’on prétend avoir expédiés à Nancy, mais qui ne sont pas arrivés. Le chef de gare, M. Philibert, est là pour le dire. Fussent-ils venus, qu’il aurait fallu les renvoyer, car c’est aux Prussiens qu’ils auraient servi et non pas à nous qui n’avions ni munitions ni poudre. En second lieu, l’ordre de faire la levée de tous les hommes valides, ce qui n’était pas seulement impossible, mais absolument déraisonnable. Enfin l’ordre de faire sauter les ponts de la Meurthe, dont l’absurdité était évidente, puisque les Prussiens en auraient été quittes pour prendre un bain de pied dans la rivière, sans que leur marche en eût été arrêtée un quart d’heure. Aussi vous savez combien ce dernier ordre a soulevé de réclamations dans la ville ; le génie refusait de l’exécuter. J’ai fait des représentations à l’Empereur sur son inutilité, et une dépêche chiffrée, venue de Metz, m’a laissé toute latitude d’agir comme je l’entendrais à cet égard. Je n’ai rien fait sauter du tout, et ce n’est pas ce que j’ai fait de plus mal. Voilà mes crimes : jugez s’ils méritaient la révocation qui est venue m’atteindre. »