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MOLIÈRE.

cultivée mais corrompue, avec ses insolences et ses vices, dans la comtesse intrigante et son digne amant, le comte escroc. C’était continuer encore avec plus de hardiesse, sous des formes plus habiles, la campagne, depuis longtemps commencée, contre toutes les vanités, vilenies ou sottises engendrées par les inégalités sociales.

Il semble qu à ce moment, du reste, une heureuse accalmie, dans ses souffrances physiques et morales, avait rendu, pour quelque temps, un essor plus libre à l’inspiration toujours prête de l’obstiné lutteur. Dans sa champêtre solitude d’Auteuil, il échappait, le plus souvent possible, aux tracas et aux soucis du surmenage théâtral et directorial. Le délicieux portrait qu’il fait tracer de sa femme par le tendre Cléonte, dans le Bourgeois, révèle tout au moins le désir et l’espoir d’une réconciliation qui fut accomplie au plus tard l’année suivante, puisque Armande lui donna un second fils en septembre 1672. Dans cet état d’esprit, comme il est en veine de gaîté et de poésie, il est en veine de générosités et de pardons. Il se réconcilie et réconcilie sa femme avec le jeune Baron, qu’on rappelle de province pour l’attacher définitivement à la troupe. Il se réconcilie avec le vieux Pierre Corneille, dont il avait été mal accueilli à ses débuts et qu’il avait lui-même irrévérencieusement attaqué.

L’occasion ou la conséquence de ces raccommodements fut un nouveau ballet, à grand spectacle, demandé par le roi. Cette fois encore, après la bouffonnerie, la poésie. Il y avait au garde-meuble un magnifique décor des Enfers, depuis longtemps