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MOLIÈRE.

de cet anniversaire, s’ajouta-t-il, pour le mourant, au poids de ses angoisses. Le clergé de Saint-Germain-l’Auxerrois avait célébré avec éclat les obsèques de la comédienne, « portée en carrosse à l’église de Saint-Paul », où elle avait voulu être enterrée. Cependant, se fondant sur le Rituel de 1646, œuvre de François de Gondi, interdisant le viatique « aux indignes, tels qu’usuriers, concubinaires, comédiens, s’ils ne sont d’abord purifiés par la sainte confession et n’ont donné satisfaction pour leur offense publique », le curé de Saint-Eustache refusa la sépulture. La requête adressée à Mgr de Harlay par la veuve et le beau-frère, n’obtint de l’archevêque qu’un renvoi à l’official, pour information, au bout de trois jours. Le cadavre restait donc toujours là, l’affaire allait encore traîner, si Mlle Molière n’avait pris le parti d’aller à Saint-Germain se jeter aux pieds du roi. On a dit que Louis XIV aurait répondu brusquement à la veuve, en la renvoyant a l’archevêque. Mais qui connaît les paroles échangées dans ce lugubre entretien ? Qu’il lui ait dit qu’il fallait l’autorisation de l’archevêque, c’est probable, c’était régulier. Ce qui est certain, c’est que le lendemain même du jour où il renvoyait l’affaire à l’official, Mgr de Harlay dut, sur la même feuille, autoriser « la sépulture ecclésiastique, à condition que ce sera sans aucune pompe, avec que deux prêtres seulement, hors des heures du jour, et qu’il ne se fera aucun service solennel ». Il faut donc bien reconnaître la encore la volonté royale certifiée par Boileau : « Sa Majesté fit dire à ce prélat qu’il fît en sorte d’éviter l’éclat et le scandale ».