Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/110

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balcon de faïence à fleurs, toit de chaume, girouette en chatte qui miaulera. Corridors sonores, trop d’escaliers tournants. Pièces vides. Noms et dates gravés au diamant dans les glaces. Étages, montée, descente : il avait raison, cela sent la fosse commune.

Quel dommage, quelle pitié, que dehors sur les pelouses il fasse trop frais ! Lui qui est déjà si transi.

Voici des dépouilles d’ours noirs et des oreillers pales dans une pièce mansardée dont la fenêtre en ogive donne sur les solitudes de la mer et a livré passage à l’inondation du clair de lune !

Est-ce la vie, ou une nuit d’hallucination, à la fin ?

Accoudé, Lohengrin peut voir la nuance de l’ombre des cils sur la joue d’Elsa, d’Elsa blottie jusqu’aux épaules dans les farouches fourrures.

— Qu’est-ce que vous regardez là ? fait-elle.

Je songe aux merveilles de l’organisation du corps humain.

Un silence. Elsa se soulève et s’accoude :

— Oserai-je m’exprimer ? fait-elle.

— Dites.

— Mais le puis-je vraiment ? Ô vous que j’ai vu en rêve pourtant, et si bon, si éloquent ! Et qui m’avez conduite ici ! Le puis-je, dans la sincérité de ce que tout m’a fait ?

- L’Éternel féminin ! voilà, petite sœur, ce que c’est que t’avoir laissé faire humanité à part. Et si nous nous mettions, nous, à organiser l’Éternel masculin ?

— Oh, allez ! c’est fait...