Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

oiseaux s’égosillent dans les paysages, que de buissons à noter ! Des couples de cerfs s’écartent de boire, des isards s’arrêtent de brouter perchés sur des rocs à pic, et, à la lisière des bois qu’on longe, les écureuils ont dans les feuilles sèches de petits bonds secs, coupés de grands silences.

Oh ! quand il l’aura vaincue et matée, cette petite sauvage surhumaine, ils viendront errer par ici, il lui fera mal à propos de la nuance d’une feuille, il ne se vengera jamais assez !

En attendant, en chasse, en chasse ! toute la matinée !...

Syrinx gardera longtemps encore son avance, elle n’est pas épuisée d’insomnies et de fièvres, elle n’a pas perdu l’habitude de la gymnastique, elle a bien dormi et vit avec principe. Et encore, tant qu’on est en plaine, cela va ; mais quand on longe un bois, Syrinx s’amuse de temps en temps à disparaître dans les arbres de la marge, et Pan doit s’arrêter pour voir si ce n’est pas un piège, si elle ne va pas prendre à travers les bois et laisser le grand chemin.

— Oh ! je t’aurai, je t’aurai ! Mais je bouderai pendant trois jours et trois nuits. Mais, que je t’aime, que je t’aime, que tu es donc mon but ! Que ta fuite est belle ! Et que mon cœur de Caliban s’illumine à chaque minute de ta fuite, et quelles belles larmes de moi cela te vaudra, ce soir, une fois que je t’aurai pardonné !

Après des bois et des prairies et des paysages, Syrinx se trouve devant un haut talus qui se présente à pic et palissade de ronces fleuries. Syrinx oblique et va escalader cet obstacle de côté, par une pente douce, puis vient se camper au haut en vue de Pan qui accourt tout droit. Elle le regarde venir.