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Page:Laisant - L’Éducation de demain.djvu/27

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universel est un instrument sans danger, entre des mains habiles et peu scrupuleuses ; on le conduit comme une bête bien dressée. Mais laisser aux cerveaux des opprimés la moindre fissure permettant de s’évader vers la lumière, quelle imprudence ! Elle fut inspirée par la peur ; on se proposait bien d’accorder le nom et pas la chose ; la preuve en est qu’après vingt ans d’instruction obligatoire, le nombre des illettrés est encore considérable. Mais on avait admis un principe, on avait entrebâillé une porte. Il est désormais trop tard ; cette porte, on ne peut plus la refermer, et c’est par là que commence à passer déjà la révolution qui substituera un monde nouveau à la société présente.

Le peuple, actuellement, est toujours dans l’ignorance ; mais il sait que l’éducation est un bien ; il sait aussi qu’à ce bien, il a droit, en la personne de ses enfants qui montent à la vie. Ce droit, il l’exigera sans tarder. Et qu’on le comprenne bien, il ne s’agit plus de torturer de pauvres petits enfants auxquels on fera réciter quelques formules creuses apprises par cœur, pour les rejeter ensuite dans la vie, en leur disant : c’est bien suffisant pour vous. On se garderait même de réclamer pour eux le bénéfice de l’enseignement secondaire actuel ; le cadeau serait funeste. Ce qu’il faut, ce qui existera, parce que cela ne peut plus être autrement, c’est un enseignement intégral, préparatoire à la vie, utile à celui qui le reçoit à tous les instants, et limité uniquement dans sa durée par les capacités de celui qui le reçoit.

À tous, l’initiation. À tous la possibilité de l’étude. Et la prolongation de l’étude, aussi loin qu’il est possible, à tous ceux qui se montrent capables d’en profiter.

Une fois ce régime établi, naturellement, on verra disparaître cette hideuse excroissance universitaire qui s’appelle le baccalauréat, cette peau d’âne si indispensable aujourd’hui aux petits bourgeois, qui ne prouve rien, qui ne sert à rien, et sans laquelle on ne peut rien.

Mais les petits bourgeois, dont la destinée aujourd’hui est d’aller au lycée, grâce à l’argent de la famille, pendant que les petits prolétaires, vont en apprentissage, que deviendront-ils ? Ce qu’on voudra et ce qu’ils