Aller au contenu

Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

135
du vieux temps

Ces morceaux de sculpture, très-bien conservés, semblent avoir été placés là comme trophée plutôt que comme ornement. Une tête en saillie et dont le cou est engagé dans la maçonnerie du haut de la façade de la même église, paraît aussi avoir appartenu à quelque divinité de la Fable.

Le zèle que déploya saint Martin contre les faux dieux rendit son nom tellement populaire parmi nous, que plus de cent vingt-cinq églises paroissiales du diocèse de Bourges, près du cinquième, le choisirent pour patron. (Voy. les anciens pouillés et l’Histoire du Berry de M. Raynal, t. I, p. 142.) Enfin, quelques miracles opérés à propos, dans nos pays, par ce même bienheureux, mirent le comble à sa renommée. Nous mentionnerons les deux suivants, qui ne sont pas les moins curieux de sa légende.

Au temps où saint Ursin vint en Berry pour y propager la foi, il ne trouva pas partout, tant s’en faut, des auditeurs attentifs. La ville de Levroux particulièrement se montra plus qu’indifférente à ses pieuses instructions. Aussi, pour la punir, ordonna-t-il, en s’éloignant, à tous les coqs de l’endroit de ne plus chanter à l’avenir, et ces volatiles, se conformant à sa volonté plus facilement que leurs maîtres, ceux-ci, à partir de ce moment, se trouvèrent on ne peut plus désorientés, surtout pendant la nuit, car, en ces temps reculés, le chant du coq était le seul chronomètre connu. — Ce triste état de choses durait depuis près de cent cinquante ans, lorsque saint Martin arriva à Levroux pour y détruire un temple païen et y prêcher la parole de l’Évangile. Cette fois, les habitants se montrèrent aussi dociles que leurs pères s’étaient montrés récalcitrants, et saint Martin, pour récompenser leur zèle, voulut bien rendre la voix à leurs coqs ; ce qu’il fit en distribuant du grain bénit à ces animaux[1].

  1. Sulpice Sévère, de Vita sancti Mart., 10, 12 ; — Labbe, Nova bibliotheca et in Patr. Bitur.