Page:Lamairesse - La Vie du Bouddha, suivie du Bouddhisme dans l’Indo-Chine.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 2 —

« Je ne prétends pas dans le Bouddhisme naissant ne voir qu’un rameau détaché d’une religion Vichnouviste, mais simplement qu’une certaine forme de Vichnouvisme était constituée dès l’époque où le Bouddhisme se fonda[1]. Établie dans les habitudes populaires, elle devint par la force des choses et « sans engager la responsabilité dogmatique du Bouddha, le cadre même de sa doctrine et surtout de son apothéose personnelle. »

Les mots de la fin forment une proposition difficile à démontrer. M. Senard pose le dilemme suivant :

« Ou bien les données historiques sont le noyau primitif et comme le foyer central de la biographie du Bouddha, et les éléments légendaires représentent un travail ultérieur, en quelque sorte accessoire, sans cohésion nécessaire ; ou bien, inversement, les traits mythologiques forment un ensemble lié par une unité supérieure et antérieure au personnage sur lequel ils sont fixés, et des données historiques ne leur ont été associées qu’en vertu d’un remaniement secondaire ». Cette dernière manière de voir est celle de M. Senard. Elle a été poussée à l’extrême par M. Kern ; pour lui la vie du Bouddha est mythique d’un bout à l’autre ; il le démontre par des considérations astronomiques fort ingénieuses[2].

Bouddha est le soleil, sa loi est la lumière, son père est le ciel, sa mère est la nuit, sa femme est la terre et son fils l’éclipse ; Kapilavastu est la région des Ténèbres, son peuple les Cayas sont les Niebelungen et les Huns de la légende Germanique. Les bienfaiteurs et protecteurs de Bouddha sont des constellations, des planètes ; ses courses annuelles figurent des por-

  1. Cela explique l’extension rapide du Bouddhisme qui, dans le dogme de la miséricorde, reproduisait jusqu’à un certain point l’élément « amour » du Vichnouvisme. Les sculptures de Bharhut et de Sanchi (3e siècle avant J.-C.) ne figurent jamais Bouddha que par un emblème qui n’est autre que les pieds vichnouvistes et solaires.
  2. Voir la Revue de l’histoire des Religions, tome V, bulletin des religions de l’Inde par M. Barth.