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Mais en rapprochant « la légende » si près des souvenirs fondés en fait et de l’existence du Bouddha qu’il ne conteste pas, si près que Bouddha et sa légende paraissent à peu près contemporains, M. Senard ne donne-t-il pas à penser qu’on pourrait tout aussi bien, en renversant sa proposition, dire :

La Biographie de Gautama qui nous a été transmise, paraît avoir absorbé quelques légendes ; elle a pu recueillir et conserver des traditions, des fragments de traditions ayant le caractère mythique, mais elle est vraisemblable, parce qu’elle s’adapte comme un cadre naturel à la réforme doctrinale et sociale qu’il a accomplie, elle donne de la personnalité du Bouddha l’idée ou l’idéal qu’on s’en est fait toujours et peut-être même avant la venue de Gautama, idéal plutôt humain que céleste.

On voit du reste qu’entre la thèse de M. Senard et l’antithèse, il n’y a qu’un faible intervalle dans lequel la discussion n’a plus guère qu’un intérêt archéologique.

L’antithèse a été soutenue par deux écrivains distingués, M. Eitel, esprit aussi libéral qu’élevé et M. Oldenberg, savant éminent qui a puisé aux sources les plus pures, aux textes palis les plus anciens. Aux yeux de M. Eitel frappé surtout de l’importance historique et humanitaire de la révolution bouddique, il n’y a de certains que les faits suivants :

Le nom d’origine du réformateur était Gautama et on lui donna pendant sa vie celui de Çakiamouni Gautama Bouddha. Il se disait de souche royale. Il renonça au monde et à la famille pour se réfugier d’abord dans l’ascétisme le plus austère ; puis reconnaissant l’insuffisance du Yoga, il fonda, « en prenant pour base toutes les religions existantes », un grand système dont le caractère était : socialement le renoncement à la caste et à la propriété, dogmatiquement l’athéisme et la déification de l’humanité, moralement le dogme de la vanité et de l’irréalité des biens terrestres, la rétribution des œuvres par la transmigration.