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Soudras, se rendit en grande pompe avec tous ses Rahans pour prendre avec éclat possession de ce monastère. Tsonda pour bien traiter ses hôtes fit préparer des mets délicats, entre autres un kari de porc frais[1]. Lorsque Bouddha en eût mangé, il fit enfouir ce qui restait de ce plat qu’il trouvait indigeste, afin que personne n’en usât après lui. Quelques instants après, il fut pris d’une violente dyssenterie, et ce fut son dernier repas.

Cette circonstance a fourni aux détracteurs de Bouddha un prétexte inépuisable de plaisanteries et un moyen sérieux de le dépopulariser, car la manducation du porc est soigneusement évitée dans l’Inde où on prétend qu’elle engendre la lèpre, et ce n’est pas sans raison au moins dans le Sud de l’Inde. D’ailleurs à l’âge et dans l’état de faiblesse du Bouddha, le moindre désordre dans l’estomac pouvait être mortel.

Malgré son indisposition, il se mit en route pour Koutheymaron[2], capitale des princes Malas et convertit l’un d’eux, Porkatha, qui était venu à sa rencontre. Ce nouveau disciple fit don de deux habillements magnifiques, l’un à Bouddha, l’autre à Ananda comme représentant l’assemblée. La légende rapporte que quand Bouddha endossa ce vêtement, son corps devint extrêmement beau et éclatant, et qu’il dit à Ananda : « Il y a deux occasions où cela m’est arrivé ; dans la nuit où obtenant l’intelligence suprême je devins un Bouddha — et aujourd’hui que je suis sur le point d’entrer dans l’état de Neibban ; demain je serai parvenu à cet état. Tsonda s’accusait amèrement d’être la cause de la maladie du Bouddha. Celui-ci, l’ayant appris, lui fit donner l’assurance que le mets qu’il lui avait fait servir avec excellente intention lui avait fait gagner les plus grands mérites. Il arriva très péniblement à la forêt des Salas ; on lui prépara sa dernière couche entre deux arbres ; il s’y

  1. Le Kari est un plat de riz et de viande ou herbes assaisonné avec des piments très violents.
  2. Koutneymaron était situé un peu au Nord ou au Nord Ouest de Béliah sur ou près les bords du Gunduck, dans un emplacement où l’on voit aujourd’hui des ruines.