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« Tout ce qu’on fait dans la vie doit se faire sans douleur. Tu marches vers la mort. Fais, au contraire, brûler des offrandes dans le feu du sacrifice. La voie du renoncement, c’est la souffrance. La victoire sur l’esprit est difficile à obtenir. »

Le Bouddhisattvat lui répondit :

« Papyan, allié de tout ce qui est dans le délire, bientôt je triompherai de toi. Tes soldats sont les désirs, les passions, la colère et l’hypocrisie ; tes alliés sont l’ambition, la flatterie, la fausse renommée, la louange de soi-même et le blâme des autres. Tes soldats subjuguent les dieux et ce monde fragile comme l’argile, je les détruirai par la sagesse. »

Marah confondu disparut.

2. Çakyamouni fit alors les efforts les plus extraordinaires, il diminua successivement sa nourriture jusqu’à ne plus s’accorder qu’un grain de riz ou de césame par jour. Il se réduisit ainsi à un état que, d’après Lalita-Vistara, il a décrit lui-même dans ces termes :

« Mes côtes devinrent saillantes comme les pattes d’un crabe et mes articulations comme les nœuds de la plante Asitaki (l’Indigo) ; mon épine dorsale paraissait tordue comme une tresse ; le crâne de ma tête était bosselé comme une gourde fanée ; la prunelle de mes yeux enfoncés dans leurs orbites ressemblait à une étoile réfléchie au fond d’un puits ; une teinte d’un bleu cadavérique avait remplacée l’éclat de ma peau lustrée, les passants me montraient du doigt en disant :

« Voyez ce beau Çramana ; il a maintenant la couleur sordide du poisson Madgoura, on le prendrait pour un esprit des cimetières.

« Les enfants me jetaient des pierres et dans ce corps affaissé et repoussant, l’intelligence paraissait éteinte et n’inspirait aucune confiance aux auditeurs. »

Les dieux inquiets d’une pénitence si extraordinaire qui pouvait faire acquérir à l’Ascète des pouvoirs surnaturels supérieurs aux leurs, lui offrent de lui rendre sa vigueur sans interrompre le cours de son jeûne en faisant pénétrer par les pores de sa peau une nourriture subtile. Mais Gautama rejette avec indignation ce subterfuge ; enfin un jour il tombe d’épuisement et ne peut se relever. On le croit mort et on prévient son père qui apprenant