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Page:Lamarck - Discours (1806).djvu/29

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Vous pourrez vous convaincre de ces vérités à mesure que vous observerez vous-mêmes tous les faits qui s’y rapportent et que vous leur donnerez toute l’attention qu’ils méritent, ce que jusqu’à présent l’on a négligé de faire.

Mettez une hydre dans un verre d’eau, et lorsqu’elle sera fixée sur un point des parois du verre, tournez ce verre de manière que le jour frappe dans un point opposé. Vous verrez toujours l’hydre aller d’un mouvement lent, se placer dans le lieu où frappe la lumière, et y rester tant que vous ne changerez pas ce point. Elle suit en cela ce qu’on observe dans les parties des végétaux qui se dirigent nécessairement, c’est-à-dire sans aucun acte de volonté, vers le côté d’où vient la lumière. Vous verrez ensuite que tout corpuscule que cette hydre rencontrera avec ses tentacules, sera amené à sa bouche sans aucune distinction ; qu’elle le digérera et s’en nourrira s’il en est susceptible ; qu’elle le rejettera en entier s’il est conservé intact, ou qu’elle rendra ceux de ses débris qu’elle ne peut plus altérer  ; mais dans tout cela même nécessité d’action, et jamais de choix qui permette de les varier.

Non, il n’est pas vrai, comme on l’a toujours dit, que la faculté de sentir et celle de se mouvoir volontairement soient générales et communes à tous les animaux.

Aussi dès la classe des insectes, qui sont encore fort éloignés de l’extrémité où finit le règne animal, on s’apperçoit avec évidence que dans ces animaux la faculté de sentir est déjà fort émoussée, quoiqu’on soit certain qu’elle y existe réellement, puisqu’ils ont des nerfs bien connus. Je vous ai exposé l’année dernière les observations qui ne laissent aucun doute sur l’imperfection du sentiment dans les insectes. Il paroît même que lorsqu’un organe, quoiqu’existant encore, est fort dégradé ou en quelque sorte appauvri, la faculté qu’il produit l’est pareillement. C’est ainsi que dans tout insecte parfait l’on trouve encore des yeux  ; mais on a tout lieu de penser qu’ils voyent fort obscurément et qu’ils en font peu d’usage.

Mais dans les radiaires où l’organe du sentiment n’est plus perceptible, on est fondé à penser que la faculté de sentir n’existe point dans ces animaux et qu’ils sont réduits à ne posséder que l’irritabilité ; en effet on a su par des observations communiquées, qu’on peut couper à une étoile de mer une de ses branches, sans qu’elle paroisse s’en appercevoir.