Page:Lamarck - Philosophie zoologique 1873 tome 1.djvu/63

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par les vents et jetés à la mer où ils périssent; ils se tiennent cachés tant que l’air est en mouvement: aussi les ailes se sont-elles amoindries. Cette disposition est devenue héréditaire, et sur cinq cent cinquante espèces répandues dans ces îles, il y en a deux cents qui sont incapables de soutenir un vol prolongé. Sur vingt-neuf genres indigènes, vingt-trois, proportion énorme! se composent d’espèces aptères ou munies d’ailes imparfaites[1].

L’ensemble de ces faits fera comprendre aux personnes étrangères à l’étude des sciences naturelles pourquoi les zoologistes, quand ils veulent s’exprimer rigoureusement, disent toujours: les oiseaux volent parce qu'ils ont des ailes, et non pas: les oiseaux ont des ailes pour voler. La première proposition exprime un fait simple, évident, indiscutable. La seconde se complique d’une hypothèse téléologique, pour parler le langage des philosophes; elle suppose une prédestination de l’animal à un certain genre de vie. L’observation nous montre au contraire que c’est le genre de vie qui détermine le développement ou amène l’atrophie des organes; ceux-ci sont actifs ou inactifs suivant les circonstances et les conditions au

  1. Darwin, Origine des espèces, p. 244.