Page:Lamare - Histoire de la ville de Saint-Brieuc.djvu/242

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aboutissaient à la banqueroute des deux tiers, de ses décrets insensés contre toutes les libertés. On vit par suite, dans les Côtes-du-Nord comme ailleurs, déporter les prêtres, interner les nobles suspects, et, par dessus tout, appliquer la loi des otages contre les parents des émigrés, et comme les vols, les pillages et les assassinats augmentaient de plus en plus, en rendre les communes responsables. Les chouans avaient certainement leur part dans les excès commis, mais la conduite des colonnes mobiles était tellement intolérable que l’administration départementale était obligée de la dénoncer au général Gency.

C’est au milieu de ces alarmes qu’eut lieu une nouvelle invasion de Saint-Brieuc par les chouans, dans la nuit du 4 au 5 brumaire an viii (26-27 octobre 1799). Les relations qui en ont été faites ont été puisées à des sources différentes. Celles de MM. Habasque et Le Maout sont établies d’après le procès-verbal d’enquête du 6 brumaire an viii, dressé par le juge de paix Cartel. Elles ne reflètent, par conséquent, que l’opinion d’un certain nombre de républicains, habitants de Saint-Brieuc. Les auteurs des Anciens Évêchés ne se sont pas bornés à cette information. Ils ont entendu des témoins pris dans les deux camps et ont eu recours largement aux papiers de famille de M. de Kerigant. Tout en se montrant favorables aux chouans sur certains points, ils ont dramatisé la résistance et présenté l’une des victimes comme l’émule des Spartiates. M. de Kerigant, en publiant récemment ses souvenirs de famille dans un livre intitulé les Chouans, a réduit cette affaire aux proportions d’un coup de main, sans y trouver de combats sérieux, ni d’épisodes héroïques.

Profitant des travaux de nos devanciers, nous recueillerons les faits incontestés et, pour les autres, nous nous appuierons de préférence sur un document inédit, qui nous inspire une certaine confiance à cause du ton simple et peu enthousiaste du récit : c’est le rapport de l’administration centrale du département au ministre de la guerre, au sujet de l’irruption des chouans à Saint-Brieuc.

La prison était remplie d’un grand nombre de chouans,