Un soupir ! un regret ! inutile parole !
Sur l’aile de la mort mon âme au ciel s’envole ;
Je vais où leur instinct emporte nos désirs ;
Je vais où le regard voit briller l’espérance ;
Je vais où va le son qui de mon luth s’élance,
Où sont allés tous mes soupirs !
Comme l’oiseau qui voit dans les ombres funèbres,
La foi, cet œil de l’âme, a percé mes ténèbres ;
Son prophétique instinct m’a révélé mon sort.
Aux champs de l’avenir combien de fois mon âme,
S’élançant jusqu’au ciel sur des ailes de flamme,
A-t-elle devancé la mort !
N’inscrivez point de nom sur ma demeure sombre ;
Du poids d’un monument ne chargez pas mon ombre :
D’un peu de sable, hélas ! je ne suis point jaloux.
Laissez-moi seulement à peine assez d’espace
Pour que le malheureux qui sur ma tombe passe
Puisse y poser ses deux genoux.
Souvent, dans le secret de l’ombre et du silence,
Du gazon d’un cercueil la prière s’élance,
Et trouve l’espérance à côté de la mort.
Le pied sur une tombe, on tient moins à la terre,
L’horizon est moins vaste ; et l’âme, plus légère,
Monte au ciel avec moins d’effort.
Brisez, livrez aux vents, aux ondes, à la flamme,
Ce luth qui n’a qu’un son pour répondre à mon âme :
Celui des séraphins va frémir sous mes doigts.
Bientôt, vivant comme eux d’un immortel délire,
Je vais guider, peut-être, aux accords de ma lyre,
Des cieux suspendus à ma voix.