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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/47

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La Fayette, séparé de ses amis, traîné de place forte en place forte jusqu’au cachot d’Olmutz, subit avec la patience de la conviction une longue et odieuse captivité. Martyr de la liberté après en avoir été le héros, sa vie publique eut, à dater de ce jour, une interruption de trente ans. La Révolution le rappela sur la scène de l’histoire. Ses amis et ses ennemis le reconnurent aux mêmes principes, aux mêmes vertus, aux mêmes généreuses illusions.


V

L’expatriation de La Fayette et la soumission de son corps d’armée laissèrent l’Assemblée sans inquiétude sur la disposition des troupes, mais tremblante sur la situation des frontières. Les Girondins, rentrés au ministère dans la personne de Servan, de Clavière et de Roland, prévoyant leur lutte prochaine avec les Jacobins, sentirent l’importance de donner à l’armée un chef qui leur garantît à la fois la victoire sur les ennemis du dehors, un appui contre les ennemis du dedans. Anciens collègues de Dumouriez, leurs ressentiments contre ce général cédèrent à la haute idée que cet homme leur avait laissée de ses talents. De son côté Dumouriez, avec la sûreté de son coup d’œil, avait sondé l’événement du 10 août et l’avait jugé. Les crises ne reviennent pas en arrière avant de s’être épuisées elles-mêmes ou d’avoir achevé leur évolution. La crise faisait un pas de plus, il fallait faire ce pas avec elle ; autrement elle