Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/298

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Sabher, Azem, Akil, Serendyb, Asrafiel,
Étaient les confidents des hauts secrets du ciel ;
Chacun, feignant l’amour pour le tyran suprême,
Dans ce chef méprisé n’adorait que soi-même,
Épiant le moment de le précipiter
Du faîte où leur dédain l’avait laissé monter ;
Et lui, lisant du cœur la haine dans leurs âmes,
Les tenait sous sa main comme un glaive à deux lames.
Qui défend la poitrine et blesse en défendant.

Son cœur dans un seul cœur se fiait cependant ;
C’était un cœur de femme encore enfant, ravie
À sa mère inconnue en venant à la vie,
Fruit vert que flétrissait une injuste oppression.
Mais, bien moins pour l’amour que pour l’ambition,
Nemphed, déjà glacé par les neiges de l’âge,
L’avait soustraite jeune au banal esclavage,
Pour sa débile main préparée en appui,
Et jusqu’au rang suprême emportée avec lui.
Son nom était Lakmi. Sous sa douzième année
Sa joue était déjà légèrement fanée ;
Car le miasme impur de cet air infecté,
Avant qu’elle eût fleuri, pâlissait la beauté.
Mais à la majesté de sa taille élevée,
À la splendeur des traits sur cette âme gravée,
Au marbre de sa peau sous les parfums poli,
À sa lèvre où l’orgueil naissant traçait son pli,
Au tissu transparent de chevelure noire
Qui de l’épaule à nu laissait briller la moire,