Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/375

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Un de ses fils coupés, la trame entière coule ;
Sa force donne seule audace à cette foule.
Lui tombé, leur complot est sans âme ; et les dieux
Me chercheront en vain un rival dans les cieux.
Mon trône raffermi pèsera sur leur tête.
Vengeance de Nemphed, au signal es-tu prête ?
Des venins de l’aspic as-tu rempli ton sein ?
Ce soir, pour déguiser mon perfide dessein,
J’ai préparé pour eux la plus ardente orgie
Dont la voûte du ciel se soit jamais rougie.
Pour laisser un moment leurs complots respirer,
De plaisir inouïs je veux les enivrer.
Pendant qu’anéantis dans leurs lourdes extases,
Ces monstres de l’ivresse égoutteront les vases,
Toi, le front rayonnant de la beauté du ciel,
Par ta ruse perfide alanguis Asrafiel ;
Et du poison subtil que ta main sait dissoudre,
Frappe entre deux soupirs son cœur comme la foudre !
J’aurai l’œil à ton œuvre : au cri qu’il jettera,
De ma feinte torpeur la foudre jaillira ;
Ses complices surpris, et se craignant l’un l’autre,
Rouleront dans la lie où l’ivresse les vautre.
Ces démons écrasés reconnaîtront leur dieu.
Laisse-moi ! tu comprends : sois mon tonnerre ! adieu ! »

Lakmi, comme un serpent privé, qui des mains glisse,
De l’infernal dessein feignit d’être complice ;
Sur sa lèvre muette elle posa eux doigts.
On eût dit que son sein se déchargeait d’un poids ;