Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/280

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boutique : bagues, pendants d’oreilles, chaînes de cuivre doré, dentelles, fichus, soierie, souliers de peau de chèvre, il n’y avait rien de trop beau pour elle, qu’on aurait dit. « Combien ceci ? combien cela ? Je prends tant d’aunes de l’une, tant d’aunes de l’autre ; et puis ces joyaux ! et puis ces boucles ! et puis ces rubans ! et encore ceci, et encore cela ! » Et la bourse sur le comptoir, pleine de pièces de trois francs et de trente sous ; je croyais qu’elle allait acheter tous les cartons !

« Et le frère venait, et il emportait et rangeait tout à mesure, bien proprement, dans le panier d’un de ses mulets.

« — Ce n’est pas tout, me dit en rougissant gracieusement la belle paysanne, mam’selle Geneviève, on nous a dit que vous étiez tailleuse pour femme, il faut encore que vous me preniez mesure de trois robes, de six collerettes, de deux coiffes en dentelle, d’un tablier, d’une demi douzaine de ceintures, et que vous n’essayiez mes boucles d’oreilles et mes colliers.

« — Bien volontiers, que je lui dis, mam’selle ; venez avec moi dans la chambre, pour que le monde ne vous voie pas déshabiller à travers la vitre. »

« Et elle vint avec moi dans la chambre, où je la déchaussai pour lui essayer ses souliers, et où je la déshabillai pour lui approprier ses collerettes, ses fichus et ses robes neuves. Ah ! monsieur, la belle créature que ça faisait ! Comme elle avait de beaux pieds, de belles mains, de belles épaules, un cou comme du satin blanc, des cheveux qui lui tombaient jusqu’aux genoux ! un visage plein, rouge, velouté comme la pêche ; des yeux, une bouche, des dents… et avec cela un air si doux, si modeste, un son de voix qui remuait tout le cœur ! Je ne me lassais pas de la regarder pendant qu’elle baissait les yeux, et je disais en