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JEANNE D’ARC.

beauté éclatait plus touchante sous l’ombre de la mort, frémissait sur la place et sur les toits. Un prédicateur célèbre du temps, Guillaume Érard, apostrophait Jeanne d’Arc, et s’efforçait de la ramener à un désaveu de ses erreurs, et à la soumission complète à ce que l’Église déciderait des droits des deux compétiteurs. « O noble maison de France, s’écriait-il, croyant renforcer ainsi ses arguments par une invocation pathétique à la race des Valois, ô noble maison de France qui fus toujours protectrice de la foi, comment as-tu été ainsi pervertie de t’attacher à une hérétique schismatique ? Oui, c’est de toi, Jeanne, que je parle, ajouta-t-il en la foudroyant du geste, c’est a toi que je dis que ton roi est schismatique et hérétique ! »

Jeanne, qui jusque-là avait écouté en silence et en humilité les injures qui ne tombaient que sur sa tête, ne put contenir son cœur en entendant outrager son Dauphin : « Par ma foi, sire, s’écria-t-elle en interrompant le prédicateur, je jure qu’il est le plus noble chrétien de tous les chrétiens, celui qui aime mieux la foi et l’Église, et qu’il n’est rien de ce que vous dites ! — Faites-la taire, » cria l’évêque de Beauvais. Les huissiers lui imposèrent silence.

Alors l’évêque lui fut un modèle de rétractation à laquelle on la conjurait de se conformer. « Je veux bien me soumettre au pape, dit Jeanne. — Le pape est trop loin, dit l’évêque. — Eh bien, qu’elle soit brûlée ! » cria le prédicateur.

Les huissiers, les bourreaux, le peuple, qui l’entouraient, la conjuraient de signer un acte dressé de soumission à l’Église, qui n’était qu’une rétractation de ses ignorances devant Dieu, sans rien désavouer de sa cause et de ses sentiments devant les hommes. « Eh bien, je signerai, » dit-elle.

A ces mots, une grande clameur de soulagement s’éleva de la foule. L’évêque de Beauvais demanda à Winchester