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CHRISTOPHE COLOMB.

ture offre à nos sens dans les lieux où nous voyons le jour, surtout quand ces spectacles sont majestueux et infinis, comme les montagnes, le ciel et la mer. Notre imagination est la contre-épreuve et le miroir des premières scènes dont nous sommes frappés. Les premiers regards de Colomb enfant contemplèrent le firmament et la mer de Gênes. L’astronomie et la navigation entraînèrent de bonne heure ses pensées dans ces deux espaces ouverts sous ses yeux. Il les remplissait de ses rêveries avant de les repeupler de leurs continents et de leurs îles. Contemplatif, silencieux, pieux d’inclination dès ses plus tendres années, son génie, enfant, l’emportait loin et haut dans les espaces, non pas seulement pour découvrir plus, mais pour adorer davantage. Dans l’œuvre divine, ce qu’il cherchait au fond de tout, c’était Dieu.

Son père, homme éclairé et aisé dans sa profession, ne résista pas à la nature qui se manifestait par de si studieux penchants dans son fils. Il l’envoya étudier, à Pavie, la géométrie, la géographie, l’astronomie, l’astrologie, science imaginaire du temps, et la navigation. Son esprit dépassa promptement les limites de ces sciences alors incomplètes. Il était de ces âmes qui vont toujours au delà du but où le vulgaire s’arrête et dit : « Assez. » A quatorze ans, il savait tout ce qu’on enseignait dans ces écoles ; il revint à Gênes, dans sa famille. La profession sédentaire et in intellectuelle de son père ne pouvait emprisonner ses facultés. Il navigua plusieurs années sur les navires de commerce, de guerre, d’expéditions aventureuses, que les maisons de Gênes armaient sur la Méditerranée, pour disputer ses flots et ses ports aux Espagnols, aux Arabes, aux Mahométans ; sortes de croisades perpétuelles où le trafic, la guerre et la religion faisaient, de ces marines des républiques italiennes, une école de commerce, de lucre, d’héroïsme et de sainteté. Soldat, savant et matelot à la fois, il