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BOSSUET.

De là des querelles interminables, que le gouvernement envenimait en y mettant l’œil et la main.

Bossuet, pour son malheur, commença dès lors à prendre parti dans ces querelles scolastiques, et à dépenser son génie et son caractère à ces polémiques de mots. Il parut d’abord incliner vers les jansénistes, par analogie de nature et de vertu. Bientôt les deux sentiments dominants en lui : le sentiment de l’autorité de l’Église et le sentiment de l’autorité du roi, supérieurs à toutes divergences de doctrine, l’éloignèrent de ces hommes selon son cœur, et firent de lui l’homme du gouvernement.

Nous parlerons peu de ces polémiques, où la grandeur du talent se perd dans le néant des disputes. L’éloquence le rappela à la chaire, son vrai piédestal.

Il y remonta en 1669, pour pleurer la reine d’Angleterre, veuve de Charles Ier, exilée en France par le meurtre de son mari. Fille, femme, sœur, mère de rois, sa vie, dit Bossuet, renfermait toutes les extrémités des choses humaines. Le roi le chargea d’égaler l’éloquence à la grandeur et aux infortunes de cette destinée. Louis XIV, après avoir donné pendant sa vie à cette reine proscrite une royale hospitalité à Saint-Germain, ne pouvait lui donner à sa mort une plus glorieuse commémoration que la voix de Bossuet. Cette oraison funèbre fut la première où il développa toutes les grandeurs d’âme, de politique, d’histoire et de parole dont la nature, l’étude et la profession l’avaient doué. Ce fut un cours d’histoire et de politique à vol d’aigle.

Bossuet, en faisant remonter au schisme de Henry VIII les causes du régicide de Charles Ier, proféra sur la fatale union du sacerdoce et de l’empire, de l’Église et de l’État, des vérités qu’il devait trop tôt démentir lui-même en servant l’Église par le glaive du roi, et le roi par la contrainte sur l’Église.

« Qu’est-ce, dit-il, que l’épiscopat, quand il se sépare