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BOSSUET.

« Je ne m’attends, dit Bossuet, à aucune félicitation sur les fortunes de ce monde, et l’abbaye que le roi me donne me tire d’embarras et de soins qui ne peuvent pas se concilier longtemps avec les pensées que je suis obligé d’avoir. N’ayez pas peur que j’augmente mes dépenses ; la table ne convient ni à mon état ni à mon humeur. Je payerai mes dettes le plus tôt que je pourrai. Pour ce qui est des bénéfices, assurément ils sont destinés pour ceux qui servent l’Église… Tant que je n’aurai que ce qu’il faut pour soutenir mon état, je ne sais si je dois en avoir des scrupules. Quant à ce nécessaire pour soutenir son état, il est difficile de le déterminer précisément, à cause des dépenses imprévues ; je n’ai aucun attachement aux richesses, mais je ne suis pas encore assez habile pour trouver que j’ai tout le nécessaire si je n’avais que le nécessaire, et je perdrais plus de la moitié de mon esprit si j’étais à l’étroit dans mon domestique. Je tâcherai qu’à la fin tout l’ordre de ma conduite tourne à l’édification de l’Église. Je sais qu’on y a blâmé certaines choses : j’aime la régularité ; mais il y a certaines situations où il est malaise de la garder très-stricte. »

Quoique irréprochable de mœurs, sobre et exempt de cupidité vulgaire, on voit que Bossuet recherchait dans sa vie l’espace, la liberté, la grandeur qu’il avait dans l’âme. Prodigue de lui-même envers l’Église et le roi, il voulait que ces puissances fussent prodigues envers lui. Il ne marchandait pas ses services, mais il en sentait le prix.

Ses nouvelles fonctions à la cour, en le plaçant à la source des grâces, élevèrent encore sa fortune et son crédit.

Cette fortune et ce crédit ne le firent pas négliger ses devoirs de précepteur d’un prince dont l’âge, le caractère et l’inaptitude d’esprit répondaient si peu à la sublimité du maître. Les travaux de Bossuet pour préparer à cet enfant les éléments tout digérés des connaissances humaines