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septième époque.

1er août 1800, la nuit, au cimetière,
près du tombeau de sa mère.

Ô nuit ! oh ! couvre-moi de ta noire épaisseur.
Demain… quoi ! c’est demain que j’emmène ma sœur !
Demain j’aurai quitté pour jamais cette terre,
Ce sépulcre où mon âme entre auprès de ma mère !
Ah ! sur ce lit d’argile où sa dépouille dort,
N’ayant entre elle et moi que ce rideau de mort,
Cette couche de cendre, hélas ! si peu profonde,
Qu’un cœur soulèverait, et qui sépare un monde !
Nuit qui deviens mon jour, laisse-moi me coucher
Près du sol remué d’hier, et le toucher !
M’enivrer de tristesse ainsi que d’une joie,
Écouter ce qu’au cœur de là-bas Dieu m’envoie,
Et, la bouche collée au sol mystérieux,
Le pétrir de mes mains, l’arroser de mes yeux !…

. . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . .


Béni sois-tu, mon cœur, et toi, ma foi divine,
De me parler si haut, si fort dans la poitrine !
En ce moment où l’œil ne voit que le trépas,
Que serais-je, grand Dieu, si vous ne parliez pas ?
Si de mon seul instinct l’infaillible espérance
Ne me répondait pas que tout n’est qu’apparence,