Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/263

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alors : quelle protection aurais-je implorée ? aurait-ce été celle de la France… qui était si loin, qui avait l’Angleterre et l’Europe sur les bras, et qui était elle-même déchirée par la guerre civile et les factions ?… »

Le général Bonaparte comprit la position du prince Beschir ; et, pour preuve de son amitié, il lui fit présent d’un superbe fusil, que Beschir a conservé en mémoire du grand capitaine.

Avant de reprendre l’histoire des événements qui suivirent la ruine de l’émir Joussef, il serait à propos de raconter une aventure qui peut-être rendit le pacha Djezar si féroce et si cruel.

Dans les premières années de son commandement, il allait, selon l’usage, à la rencontre de la caravane qui revenait du pèlerinage de la Mecque. (Par la suite, le pacha de Damas fut chargé de cette cérémonie, et celui d’Acre ne fut plus tenu que de subvenir aux dépenses de la caravane et de payer un tribut aux Arabes du désert.) Les mameluks, à qui, en son absence, Djezar avait laissé la garde de son sérail, en forcèrent les portes, et se livrèrent à toute la brutalité de leurs passions.

Le pacha revint ; et, loin de fuir à son approche, les mameluks s’emparent du trésor, ferment les portes de la ville, décidés à répondre à la force par la force. Avec la faible escorte qui l’accompagnait, Djezar ne pouvait vaincre : cependant les mameluks lui mandèrent que, s’il voulait les laisser retirer avec leurs armes et leurs che-