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chrétiens sont groupées sur les rochers, à l’ombre du monastère. Ces Arabes sont les plus féroces et les plus perfides de tous les hommes. Ils reconnaissent l’autorité d’Abougosh. Le nom d’Abougosh fait pâlir les moines. Ils ne pouvaient comprendre par quelle puissance de séduction ou d’autorité ce chef nous avait accueillis ainsi, et donné son propre neveu pour guide ; ils soupçonnaient en ceci quelque grande intelligence diplomatique, et ne cessaient de me demander ma protection auprès du tyran de leurs tyrans.

Nous rentrâmes lorsque la nuit fut venue, et passâmes la soirée dans le corridor du couvent, dans de douces conversations avec l’excellent supérieur et les bons pères espagnols. Ils étaient étrangers à tout ; aucunes nouvelles d’Europe ne franchissent ces inaccessibles montagnes. Il leur était impossible de comprendre quelque chose à la nouvelle révolution française. « Enfin, disaient-ils pour conclusion à tous nos récits, pourvu que le roi de France soit catholique et que la France continue à protéger les couvents de terre sainte, tout va bien. » Ils nous firent voir leur église, charmante petite nef bâtie à l’endroit où naquit le précurseur du Christ, et ornée d’un orgue, ainsi que de plusieurs tableaux médiocres de l’école espagnole.

Le lendemain, nous ne pûmes résister au désir de jeter au loin un regard sur Jérusalem.

Nous fîmes nos conditions avec les pères ; il fut convenu que nous laisserions au monastère une partie de nos gens, de nos chevaux et de nos bagages ; que nous ne prendrions avec nous que les cavaliers d’Abougosh, les soldats égyp-