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Page:Lambert - Rencontres et entretiens, 1918.djvu/31

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LES « CHÊNEURS »

rendait le dernier soupir, sans avoir repris connaissance.

Ceci se passait vers la fin du printemps. Je vins au monde dans le courant de l’hiver suivant. L’on s’aperçut à ma naissance que j’avais une marque au côté droit ; elle ne devait jamais disparaître. On m’a assuré que chaque fois que quelqu’un de la famille était mêlé dans une échauffourée avec les « Chêneurs », tout bébé que j’étais, je passais la journée précédente à crier, que, souvent même, je portais ma main à mon côté. Chose certaine, c’est que depuis que j’ai l’âge de raison, j’ai eu souvent l’occasion d’éprouver cette douleur dont je vous ai parlé tout à l’heure. Voici un fait, écoutez : J’avais huit ans ; c’était à l’approche de l’hiver, on manquait du nécessaire à la maison, car depuis neuf mois mon père atteint de rhumatismes, souffrait les supplices les plus atroces. Un de mes oncles, qui était venu à la maison, témoin de ce spectacle avait engagé fortement mon père et ma mère à se rendre chez lui pour y passer l’hiver. Après avoir réfléchi au dénuement où l’on était, mon père accepta l’invitation, et ma mère rangea tout en ordre dans la maison en vue d’une longue absence. La veille de notre départ, je ressentis cette douleur dans