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UN PARRAIN DE MALHEUR

Et à propos de soucis de famille, reprit-il, après une pause que je ne voulais pas interrompre, j’ai à te conter une petite histoire qui pourra peut-être t’intéresser.

Mon ami commença alors le récit suivant, dont je puis vous garantir l’authenticité, puisqu’il me fut donné de vérifier par moi-même les faits en dernier lieu. Mais laissons parler mon ami.

Depuis que j’ai quitté le Canada, dit-il, pour venir aux États-Unis, je suis toujours demeuré à Manchester. À l’époque du fait dont je veux t’entretenir, j’avais pour voisin de porte un Acadien, père de famille, qui avait nom Jean C. Dans les environs on l’appelait tout simplement le père Jean.

C’était un homme qui dépassait la soixantaine ; Bon vieux, grand et robuste pour son âge. Presque chaque soir, nous faisions la veillée ensemble, le père Jean était d’une jovialité remarquable ; d’ordinaire, il aimait à rire. Souvent cependant j’avais remarqué sur sa figure une nuance de tristesse, un malaise passager, et cela surtout lorsqu’on venait à parler des petits enfants.

Les beaux jours du printemps étaient revenus remplacer les jours sombres et froids de l’hiver.