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Page:Lambton - Rapport de Lord Durham.djvu/158

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arrivent ici, et qui errent de côté et d’autre dans un état de dénuement complet. »

Néanmoins l’exemple le plus frappent du manque de système et de précaution de la part du gouvernement est celui des vieux soldats appelés pensionnaires commués (commuted pensioners) dont près de 3000 se rendirent dans la colonie en 1832 et 1833. On trouvera dans les témoignages de M. Davidson et autres une description complète du sort de ses infortunés. Plusieurs d’entre eux débarquèrent à Québec avant que l’on eût reçu dans la colonie les instructions de leur payer les sommes qu’ils avaient droit d’avoir à leur arrivée, et même avant que le gouvernement provincial eût appris leur départ d’Angleterre. Plusieurs dépensèrent en débauches le montant de leur commutation, ou se le firent dérober pendant leur ivresse. Plusieurs n’essayèrent jamais de s’établir sur les terres qui leur étaient accordées ; et parmi ceux qui en firent l’essai, un grand nombre ne purent découvrir dans quel endroit des forêts leurs concessions étaient situées. Plusieurs vendirent leurs titres sur les terres pour une bagatelle, et se trouvèrent, quelques semaines après leur arrivée, dans un état de complète indigence. Sur le nombre entier qui s’est rendu dans la colonie, il n’y en a probablement pas un sur trois qui ait essayé de s’établir lui-même sur ses terres, et pas un sur six n’y reste actuellement établi. Le reste en général erra dans le voisinage des principales villes, où ils s’efforçaient d’arracher leur subsistance par la mendicité et un travail temporaire. Un grand nombre d’eux périt misérablement dans les deux années du choléra, ou succombèrent aux maladies engendrées par leurs habitudes dissolues. Le plus grand nombre d’entre eux sont peu-à-peu disparus. La situation de ceux qui survivent exige hautement quelque mesure de soulagement immédiat : ils sont dans un dénuement et une souffrance extrêmes. Leurs terres leur sont presque entièrement inutiles, et ils ne peuvent obtenir aucun emploi convenable soit comme fermiers, soit comme domestiques. Au commencement de chaque hiver, ils se trouvent conséquemment à la merci de la charité publique. Dans la province supérieure leur situation est également déplorable, un grand nombre d’entre eux seraient péris dans une détresse absolue s’ils n’eussent pas été secourus par le gouvernement provincial. J’ai lieu d’espérer que leurs pensions leur seront rendues, et qu’à l’avenir si jamais le gouvernement intervient directement ou indirectement pour promouvoir l’émigration de gens pauvres dans ces colonies, ce sera sous quelque arrangement systématique calculé pour prévenir le choix de classes incapables de profi-