Page:Lamotte - L'éducation rationnelle de l'enfance, 1922.djvu/23

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à leurs entreprises ce que nous ne saurions y apporter, la monnaie en quantité et l'appui des pouvoirs.

De telle sorte que la marmaille d’aujourd'hui se dresse, à nos yeux, en deux parts : les petits camarades qui grandissent selon notre idéal et ceux qu'on empoisonne soigneusement des préjugés antagonistes. Les premiers sont une poignée, les autres une masse innombrable.

Or, ces mioches, nous les voulons tous pour la liberté. Et la tâche qui s'offre à nous est double : d’une part, nous avons à assurer le développement harmonieux du plus grand nombre possible ; d'autre part, à nous opposer à la perversion et à l'asservissement de ceux dont nous ne pouvons nous charger.

Occupons-nous d'abord, en ces lignes, des parias. Bientôt, nous reparlerons des privilégiés : on reproche souvent à l'école laïque de mal se défendre contre la concurrence des ignorantins. Comment en serait il autrement ? Les méthodes employées dans l’une et l’autre école sont, aujourd’hui, sensiblement les mêmes, mais si le cher frère, gras et bien nourri, fait des classes de vingt à vingt-cinq élèves, celles de la laïque comprennent rarement moins de soixante et souvent plus de quatre-vingts écoliers !

L'instituteur primaire, outre qu'il est écrasé par une besogne au dessus des forces humaines, que compliquent presque toujours les soucis de la misère, est garrotté dans un programme qu’il doit parcourir dans l’ordre, et obligé, de par les visites inspectoriales, de faire du trompe l'œil (je veux dire de passer d'une connaissance à l’autre, dans un temps prévu d'avance et souvent inférieur à celui qu’il aurait fallu aux écoliers pour s'assimiler ces connaissance ). Enfin, quelques uns des élèves apportent de leur famille des habitudes et une moralité telles qu'ils constitue un danger permanent absorbant toute l'attention du maître, et je connais une école de filles de la banlieue où l'institutrice m'a dit avoir vu arriver ivres des enfants de