Page:Lamotte - L'éducation rationnelle de l'enfance, 1922.djvu/24

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dix ans!

Or, s'il est absolument impossible d'instruire sans expérience, sans outils, presque sans images et tout à fait sans liberté, soixante ou soixante-dix enfants, plus ou moins bien portants, dans un temps restreint, s'il est matériellement impossible de s'assurer que les leçons ont été comprises par chacun, il est encore bien plus illusoire de compter sur le « travail dans la famille » pour compléter cette instruction. Chaque soir, néanmoins, les enfants emportent devoirs et leçons et achèvent d'apprendre : 1° à bafouiller ; 2° à admettre, sans contrôle, les idées que d’autres ont émises ; 3° à s’assimiler des notions sans netteté, se faisant ainsi un esprit brumeux qu'ils garderont bien souvent et qu’apprécieront beaucoup les politiciens, 4° à travailler sans goût.

On peut ajouter que l’écolier, chez lui est la plupart du temps, mal installé, mal éclairé, bousculé par ses petits frères et que, s'il luie st impossible da s'appliquer, il a toute latitude pour parfaire sur son échine et sur sa vue les déformations scolaires ( car le mot existe, évocateur de cages et de supplices moyenâgeux : déformations scolaires ! ).

Quelques camarades anarchistes et nous-mêmes avons pensé à grouper les enfants de l'école, après la classe, pour commenter et compléter les leçons du programme de la bonne manière. L'instituteur y trouverait son compte car ces enfants auxquels leurs leçons seraient expliquées, seraient les plus instruits. L'école communale aurait des élèves de douze à treize ans sachant vraiment lire et s’exprimer, ce qui se voit rarement aujourd'hui. Voir une fière et intelligente génération s'élever à la place du troupeau attendu, cela serait certainement une joie pour nos chers dirigeants…

Ce serait une excellente force et d'une grande portée, que de compléter ainsi l’enseignement de l'État.