Page:Lampryllos - La Séparation des deux éléments chrétien et musulman comme la solution la plus honnête et la plus praticable de la question d'Orient, 1868.djvu/20

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Pourquoi un État qui compte jusqu’à trente-cinq millions d’habitants et qui occupe les positions les plus fortes, les contrées les plus riches de l’ancien monde, peut-il devenir à tout moment la proie du premier venu si on l’abandonne à lui seul ? La cause de cette faiblesse principale est dans la juxtaposition, dans le mélange, sans fusion possible pour de grands siècles encore, des deux éléments chrétien et musulman. Ce sont ces deux forces qui se pondèrent et s’équilibrent, s’entre-choquent et se contrecarrent, et qui, comme deux acides adverses contenus dans le même récipient, s’entre-rongent et s’entre-détruisent, ou tout au moins se neutralisent.

Pour maintenir cet antagonisme ruinant, on abandonne toute l’Asie supérieure et les provinces d’Afrique comme un rebut, et tout ce qu’on peut disposer de forces asiatiques et africaines unies à celles d’Europe est employé à la compression de l’élément chrétien en Europe. Ainsi on est le maître tyrannique et cent fois détesté des provinces centrales et des provinces occidentales ; on aspire à ressaisir une domination perdue sur les provinces danubiennes ; on entretient, avec beaucoup de peine, dans des alarmes et des transes continuelles, de cent à cent cinquante mille soldats entre le Danube et la mer Égée, mais ce n’est qu’à la condition d’être le maître nominal de l’Égypte, le maître hypothétique des Régences barbaresques, le maître imaginaire de l’Arabie, le maître douteux de la Syrie, le maître contesté du Kurdistan et du Diarbékir.

À quoi cela sert-il de tant embrasser, sans rien pouvoir étreindre ? À quoi cela sert-il d’avoir tant