Page:Landes - Contes et légendes annamites, 1886.djvu/281

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Les gens de la maison virent cet individu qui dormait sur le lit et qu’aucun d’eux ne connaissait. Ils le réveillèrent et lui demandèrent qui l’avait invité. Khâ qui avait cuvé son vin se réveilla. À la vue de ces inconnus parlant avec un accent étranger il fut saisi de frayeur, se rappelant que pendant la nuit il avait été invité à venir à un festin et ne sachant comment il se trouvait couché là. Il demanda où il était et on lui répondit qu’il était dans un village du huyên de Dông ngàn, dans la province de Bâc ninh. « Mais vous, lui dit-on, où demeurez-vous et qui vous a invité à venir ici ? » À cette demande, Khâ fut troublé et déclara la vérité. « Je suis, dit-il, du village de Kè giàng dans le Nghé an. Au point du jour je labourais au pied de la montagne de Giàng, quand un inconnu parut à la tête de mes bœufs et m’invita à venir à une fête chez lui. Je lui dis que je labourais de bonne heure afin de planter des patates et que je n’avais pas d’habit sous la main, mais il me prêta des habits et insista tellement que je le suivis pour lui être agréable. En chemin, il me dit : « Il y a quelques années j’étais pauvre et je suis venu ici pour gagner ma vie ; je demeure dans cet endroit où vous labourez, mais mes enfants habitent encore là-bas. » Ces paroles m’avaient bien fait réfléchir, mais je n’avais su que faire ; je ne pouvais pas penser qu’il me menât ainsi à cinq ou six jours de marche. »

À ces paroles les gens de la famille furent remplis de joie. « C’est évidemment, dirent-ils, notre père qui est parti pour aller à Huè il y a quelques années et avait disparu. Nous ne savions où étaient ses restes et si on les avait enterrés. Maintenant nous savons où est son tombeau, grâce à cet homme à qui nous sommes grandement redevables. » Ils le comblèrent de présents et le renvoyèrent à six jours de marche, dans sa maison où sa femme et ses enfants le croyaient mort.