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des capitaux, que si c’est le mode le plus fréquent dans notre société, il en a été tout autrement dans les sociétés primitives, que là les capitaux étaient constitués d’ordinaire par le moyen d’un surcroît de travail que les hommes s’imposaient[1]. Un sauvage qui veut se fabriquer un instrument de travail peut :

1° sans travailler davantage, diminuer chaque jour sa consommation d’une certaine quantité de subsistances qu’il accumulera, et avec lesquelles il s’entretiendra quand il fabriquera son instrument ;

2° travailler chaque jour un peu plus qu’à l’ordinaire, et accumuler le surplus de subsistances ainsi obtenu ;

3° consacrer chaque jour à la fabrication de l’instrument une partie du temps qu’il employait précédemment à chercher sa subsistance ;

4° sans donner moins de temps à cette recherche, consacrer chaque jour un peu de temps — ce sera un travail supplémentaire qu’il s’imposera — à la fabrication de l’instrument[2].

Mais enfin, toujours il y aura abstinence, puisque toujours on sera en présence d’un bien de consommation soit réel, soit virtuel[3] que le capitaliste aura renoncé à consommer de suite.


85. Prévenus des diverses manières dont l’abstinence peut se pratiquer, voyons la critique que Böhm-Bawerk a faite de la théorie de l’abstinence, et qui est de toutes la plus approfondie.

  1. Voir Hodgskins, note à Smith, Richesse des nations, l. 9 (p. 133 de l’éd. indiquée plus haut), Gide, Principes d’économie politique, II. i, 3, 5 (2e éd. , Paris, 1889), etc.
  2. Dans notre société, où les capitaux consistent à peu près exclusivement en argent, ce sont les deux premiers de ces modes de capitalisation que l’on rencontrera presque toujours.
  3. Il sera tel dans le cas d’un travail supplémentaire que le capitaliste s’impose.