Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/187

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détruise ma plantation, la dépense, le sacrifice que j’aurai consenti inutilement sera d’une journée de travail. Mon sacrifice sera-t-il donc plus grand s’il ne survient pas de tempête, et que mes arbres après dix ans me donnent leurs fruits ? C’est ce qu’avancerait Senior, lorsqu’il affirme que dans ce deuxième cas le sacrifice du capitaliste est représenté par la somme de son travail et de son attente de dix ans ; et c’est ce que Böhm-Bawerk trouve absurde. Et Böhm-Bawerk d’ajouter encore : lorsqu’un travail donne immédiatement son produit, celui-ci ne coûte pas autre chose que ce travail même ; le produit se fait-il attendre un an, deux ans, dix ans, il aura coûté, outre le travail, une abstinence d’un an, de deux ans, de dix ans ; mais si ce produit n’arrive jamais, alors on ne verra pas le sacrifice de l’abstinence s’élever à l’infini ; tout au contraire ce sacrifice redeviendra nul, et de nouveau il ne restera en fait de dépense que le travail accompli, tout seul[1].

Mais Böhm-Bawerk a-t-il présenté les choses ainsi qu’il faut ? Une tempête détruit, à peine terminé, mon travail d’une journée. Ma perte est égale sans doute à une journée de travail. Elle est égale dans ce moment à une journée de travail ; en un certain sens, j’oserai dire que cette perte est destinée à aller croissant. ans un an, il faudra ajouter à la journée de travail l’attente d’un an, cette attente qui d’ailleurs aura été vaine ; dans deux ans, la perte devra être considérée comme plus grande, car la dépense de la journée de travail aura été suivie d’une attente — vaine toujours — plus longue. Je veux dire par là que si par impossible, grâce à un miracle, les arbres détruits par la tempête venaient à être rétablis après

  1. Pp. 339-340.