Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/225

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d’après Böhm-Bawerk, cède un bien futur contre un bien présent ; il incorpore sa main-d’œuvre à des produits qui se vendront, dont la valeur sera réalisée après six mois, un an, deux ans ou plus, et en échange de cette main-d’œuvre il reçoit un salaire avec lequel il s’entretient. Au produit qui vaudra 100 un jour, il préfère des biens tout de suite disponibles qui valent 9 % ; le capitaliste, au contraire, préfère aux biens présents qui valent 95 les biens futurs qui vaudront 100.

107. Remarquons tout d’abord que peut-être il n’est pas tout à fait correct de parler ici d’un échange de biens présents et de biens futurs. Le capitaliste, à coup sûr, cède des biens présents. L’ouvrier cède-t-il des biens futurs ? Il ne promet pas, comme le prodigue qui emprunte, de donner plus tard des biens. Il fournit sur l’heure sa force de travail ; il la fournit dans une production dont les produits ne seront perçus que plus tard, mais il l’eût fournie aussi bien, et au même prix, pour une production instantanée. De même, celui qui vend au capitaliste des matières premières ne s’inquiète pas de l’usage que le capitaliste en fera. Ces matières premières pourraient peut-être être consommées improductivement ; c’est par la volonté du capitaliste qu’elles sont employées productivement et qu’elles deviennent biens futurs. Le capitaliste, en un mot, n’échange pas proprement des biens présents contre des biens futurs ; il acquiert, en cédant des biens présents, d’autres biens dont il fait — si l’on peut ainsi parler — des biens futurs, après échange.

Acceptons toutefois l’idée de l’échange de biens présents et de biens futurs telle qu’elle est chez Böhm-Bawerk. Pour comprendre cet échange, pour comprendre, en d’autres termes, l’apparition du phénomène de l’intérêt, il n’y a pas lieu de se demander pourquoi