Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/253

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vail : l’ouvrier n’aurait, pour se procurer les 6.200 francs, qu’à placer son gain à intérêts à la fin de chaque année. Et semblablement, 5 ouvriers travaillant chacun une année à une machine qui vaudra 5.500 francs, si la rémunération de ces ouvriers a lieu au moment où la machine est achevée, ils n’auront pas droit au même salaire : un partage égal des 5.500 francs favoriserait le dernier travailleur, qui n’aura attendu son salaire que 6 mois en moyenne, au détriment des autres ; le partage équitable, c’est donc celui qui donnerait par exemple 1.200 francs, 1.150 francs, 1.100 francs, 1.050 francs, 1.000 francs aux 5 travailleurs. Que si maintenant chaque ouvrier demande à être payé à la fin de son année de travail, alors le dernier étant payé toujours 1.000 francs, les autres aussi ne devraient, en bonne justice, toucher que 1.000 francs. Et sans doute l’entrepreneur pourrait donner à chacun des ouvriers, à la fin de son année de travail, 1.100 francs, non pas 1.000 francs ; il pourrait donner à l’ouvrier unique qui travaille cinq ans de suite 1.100 francs à la fin de chaque année. Mais alors il se dessaisirait de ce qui lui revient légitimement, il ferait un cadeau aux ouvriers[1].

Ainsi raisonne Böhm-Bawerk, et son argumentation est vraie en grande partie. Le régime actuel de la propriété, la distribution de cette propriété, et tout un ensemble de circonstances étant données, le capitaliste a la possibilité de percevoir des intérêts : ceux-ci sont le résultat nécessaire de l’état de la société économique, tel qu’il est posé. Mieux que cela : la nécessité en vertu de laquelle le capitaliste perçoit des intérêts est une nécessité qui n’implique aucune contrainte matérielle, qu’il faudrait se garder de confon-

  1. I. pp. 467-479.