Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/252

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qui décide les individus à capitaliser, et qui ainsi a permis à la production d’atteindre le développement où nous voyons qu’elle est parvenue, qui la fait s’accroître sans cesse. Toutefois Böhm-Bawerk est obligé de convenir aussitôt que l’épargne privée n’est pas le seul mode par lequel des capitaux puissent être constitués, que dans un État socialiste il pourrait y avoir aussi une capitalisation. Et la remarque qu’il ajoute, que seule la capitalisation privée a fait ses preuves, son insinuation qu’un État socialiste ne saurait pas pourvoir convenablement à cette nécessité sociale qu’est la capitalisation ne nous ôtent pas le moins du monde le droit de concevoir un régime différent du régime présent, et où n’existerait plus le prélèvement qu’opèrent aujourd’hui les capitalistes sur la production.

119. L’intérêt est juste, dit encore Böhm-Bawerk[1]. C’est un phénomène naturel que les biens présents vaillent plus, toutes choses égales, que les biens futurs ; l’intérêt donc est un phénomène naturel, et étant naturel, il est juste. Un ouvrier travaille pendant 5 ans à construire une machine, laquelle, achevée, vaudra 5.500 francs. L’entrepreneur qui emploie cet ouvrier lui devra, quand son travail sera terminé, 5.500 francs ; mais si l’ouvrier demande à être payé année par année, faudra-t-il lui donner 1.100 francs à la fin de la première année, 1.100 francs à la fin de la seconde, et ainsi de suite ? faudra-t-il que pour l’ouvrier l’attente du produit soit réduite de 5 ans à 2 ans et demi[2] ? Non pas, car payer l’ouvrier 1.100 francs par année, cela reviendrait à lui donner environ 6.200 francs au moment de l’achèvement de son tra-

  1. Pp. 383-384.
  2. Cette durée de 2 ans et demi serait une durée moyenne.