Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/39

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premières auxquelles il applique la main-d’œuvre de ses ouvriers ; il lui faut du « capital constant ». Mais si le capital constant est une condition nécessaire de l’acquisition de la plus-value, seul le capital variable sera productif de plus-value ; il sera la portion la plus importante du capital, et l’on peut même aller jusqu’à dire que seul il répondra parfaitement à la définition que Marx a posée tout d’abord[1].

  1. Pour exposer d’une façon complète et tout à fait précise la conception marxiste du capital, il faut indiquer quelque chose encore. Dans la société d’aujourd’hui, les travailleurs employés dans la production, pour la plupart, ne travaillent pas à leur compte. Aussi à la définition que j’ai citée plus haut Lassalle pouvait ajouter : « le surplus du rendement de la production sur les subsistances [qui constituent le capital] revient à ceux qui ont fait l’avance de ces Subsistances ». Marx, lui, ne veut voir de capital que là où la propriété des moyens de production et le travail sont séparés : « des moyens de production éparpillés qui fournissent aux producteurs eux-mêmes leur occupation et leur subsistance, sans que jamais le travail d’autrui s’y incorpore et s’y valorise, ne sont pas plus capital que le produit consommé par son propre producteur n’est marchandise. — Des moyens de production et de subsistance appartenant au producteur immédiat au travailleur même ne sont pas du capital. Ils ne deviennent capital qu’en servant de moyen d’exploiter et de dominer le travail ». Le capital, I, chap. 25 et 33, pp. 309 et 344. Marx est guidé par sa préoccupation de dégager le caractère essentiel de l’économie actuelle, et son évolution. Mais si l’on veut s’élever au-dessus de la considération du temps présent, et faire abstraction de tout souci d’ordre pratique, on adoptera à coup sur une conception du capital plus large que celle de Marx.
    — Je veux mentionner une dernière définition du capital, qui n’a qu’une parenté très lointaine me toutes celles dont je viens de parler. Pour Irving Fisher (Senses of « capital » , Economic journal, 1897, p. 199), le capital, c’est la richesse qui existe dans un moment donné, c’est la richesse prise, en quelque sorte, en photographie instantanée. Le revenu, au contraire, c’est la richesse acquise pendant un temps donné. Le capital et le revenu seraient donc définis de deux points de vue différents, un même bien pourrait être du capital ou du revenu selon le point de vue d’où on le regarderait. Voici le rapport que je découvre entre la conception que Fisher se fait du capital et la capitalisation : la richesse qui existe dans Iun moment donné — le capital selon Fisher — peut servir à la capitalisation peut devenir du capital au sens que j’ai cru devoir donner à ce mot, pour autant que cette richesse pourrait être consommée instantanément.