Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/62

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cette utilité se déterminant d’ailleurs soit par la satisfaction que nos biens peuvent nous procurer par eux-mêmes, soit par celle que nous retirerons d’eux en les échangeant[1]. Un employé fait des économies en prévision de la vieillesse ; je suppose, pour plus de simplicité, qu’il ne place pas ces économies, qu’il se contente de les thésauriser : gagnant 4.000 francs par an, il n’en dépense que 3.000, et conserve le reste pour ses vieux jours. Il préfère sans doute aux biens qu’avec les 1.000 francs économisés il pourrait s’acheter tout de suite les biens — que nous supposerons pareils à ceux-là — que ces 1.000 francs lui permettront de s’acheter plus tard. Seulement il faut tenir compte de ceci, que l’utilité des biens diminue avec la quantité qu’on en peut avoir. Celui qui n’a que 1.000 francs pour vivre tire de cette somme beaucoup plus d’utilité que ne tirerait d’une dépense supplémentaire de 1.000 francs celui qui a déjà dépensé 3.000 francs. Et ainsi, de ce que notre employé conserve pour plus tard une partie de son gain on ne doit nullement conclure qu’il préfère les biens futurs aux présents.

Citera-t-on, pour montrer que les biens futurs sont parfois préférés aux présents, l’enfant qui garde un certain temps le gâteau qu’on lui donne, avant de le manger ? Je pourrais dire que ce raffinement, par rapport à l’ensemble des phénomènes économiques, est négligeable : on ne voit pas que dans la société économique beaucoup d’épargnes soient faites qui ne doivent pas accroître ou permettre d’accroître le bien-être total — considéré à travers toute la durée de la vie — de ceux qui les font ; l’enfant lui-même ne reste

  1. Böhm-Bawerk emploie ici les expressions de valeur d’usage et de valeur d’échange subjective (voir II, pp. 176 et suiv.).